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Non, non, ne rougis pas, Céline…

5 Décembre 2011 , Rédigé par Passerelle Publié dans #Intermède musical

Elle a le trac, Céline. Le regard un peu aveuglé par la chaleur des projecteurs, les mains tremblant légèrement, elle empoigne sa basse d’un geste pas très sûr et s’excuse par avance auprès de son public : pianiste de formation, elle n’a commencé à toucher de cet instrument que l'été dernier, au pied levé, encouragée par des collègues québécois qui ont vu briller l’envie dans ses yeux lors du Grand 8, un échange de création franco-canadien.

 

Celine-Pruvost.jpg

 

Et cette basse, elle la tient un peu comme un bébé qu’on lui aurait mis dans les bras, dont elle ne saurait trop que faire, la berçant doucement pour l’amadouer… car la musique, c’est son bébé à elle, ses doutes et ses fausses couches, ses pannes d’inspiration et ses montées de la, ses crises de panique et ses baby-blues - ­ petite cigale qui veut juste papillonner encore quelque temps, se perdre dans les méandres de la jeunesse, et donner vie à ces chansons douces...

 

Un temps qui ne lui fait pas peur, d’ailleurs : saisons qui s’effilochent au rythme d’une garde-robe amoureuse et coquette, désir de rides et de cheveux blancs, d’amours et de désamours, solitudes et déchirures, clichés embourbés, qu’elle exprime sans concession pour une société où règne le mythe de l’anti-âge et de l’éternelle jouvence.

 

Celine Pruvost

 

Car ne vous fiez pas à ce joli minois : derrière son sourire angélique, Céline Pruvost cache des crocs bien acérés ! Tantôt chatte câline, tantôt louve sensuelle, tantôt tigresse enragée, elle chante avec humour ses sautes d'humeur de jeune fille en fleur. La mélodie suit, languide et suave, soudain abrupte et acerbe, les soubresauts d'un coeur qui éclot.

 

Les mots ne sont pas en reste : jubilatoires, les textes de Céline, qui a fait ses lettres à bonne école, émanent une verve farouche ; dans une veine oulipienne, l'ex khâgneuse distille des calembours rebondissants, des chansons au format réversible, des déclinaisons insolites ; et sous ses airs de poupée sage, la demoiselle est capable de vous décocher des chutes assassines !

 

Samedi soir, cette jeune auteur-compositeur-interprète a envoûté Le Limonaire1, un « bar à vins et à chansons » où des artistes, connus et moins connus, défilent chaque soir sur la scène d'un décor façon caf'-conc' Belle Époque. Les murs recouverts d'affiches et d'ardoises de ce minuscule troquet parigot ont résonné de sa voix chaude et cristalline - ­ envolées timides de frêle colombe transformées en fougueux rugissements - ­ soutenue par le brillant doigté de Martin, à la guitare. Et, entre la poire et le fromage, on aurait bien repris un peu de ces bribes de vie croquées avec tendresse et saupoudrées d'ironie espiègle.

 

Attention, jeunes talents à surveiller de (très) près !

 

1Le Limonaire, bar à vins et à chansons, du mardi au samedi, 18, rue Cité Bergère - 75009 Paris, ; tel : 01 41 60 72 60 ; http://limonaire.free.fr/

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